Le siphon bleu
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Le narrateur, un Suisse-allemand à l’âme sensible, nous entraîne dans une expérience troublante, racontée avec une poésie envoutante.
Tout commence un soir ordinaire : seul dans une salle obscure, il assiste à la projection d’un film étranger en noir et blanc. Mais, à sa sortie du cinéma, le monde qu’il connaissait a basculé. Les rues sont envahies de voitures d’un autre âge, sa propre maison est habitée par un inconnu, et même les policiers portent l’uniforme d’une guerre révolue. Désemparé, il erre jusqu’à la gare et monte dans un train en direction de Bâle, sa ville natale, comme attiré par un besoin vital de retour aux sources.
Là, la surprise se fait vertigineuse : sa maison d’enfance l’attend, ses parents sont toujours là, mais rajeunis de cinquante ans… et incapables de le reconnaître. Le temps, semble-t-il, a été balayé par un simple film. Fasciné, il décide de jouer le jeu et de revisiter son passé avec la conscience d’un adulte.
Ainsi croise-t-il de nouveau sa future épouse, retrouve son premier amour d’enfance et même un chien fidèle qui l’accompagne dans ses errances. Dans un étrange vertige, il se met en quête de lui-même avec ses proches, à la demande de ses parents inquiets par la disparition du fils "parti au cinéma et jamais revenu". Lorsque le voyage le ramène une première fois dans son époque, c’est avec ce chien qu’il revient, comme une preuve tangible de son escapade temporelle.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Poussé par cette énigme troublante, il retourne au cinéma : cette fois, tout autour de lui reste intact… mais c’est lui qui change, redevenant un enfant de quatre ans. Confronté au regard de sa propre fille qui ne le reconnaît plus, il comprend que ce voyage n’est pas qu’un caprice du temps, mais une véritable métamorphose. Finalement, reprenant une nouvelle fois ce passage mystérieux par la salle obscure, il choisit d’accepter le destin : revivre son enfance, cinquante ans plus tôt, dans la maison familiale... pour parcourir à nouveau sa vie.
Urs Widmer : Éditions Librairie Arthème Fayard
Publié en 1994 (110 pages)
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